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Le nouveau plan Verdier de Maxime Sorel est en construction chez MerConcept

Après un premier Vendée Globe très abouti, soldé par une belle 10e place, Maxime Sorel intègre la Ligue des Champions en Imoca. Son plan Verdier est en construction chez MerConcept à Concarneau où il a accepté de nous en dire plus.

 

Votre plan Verdier est un sister-ship d’Apivia : si vous deviez le résumer en trois points ?

Il y a l’étrave, les foils et la position des masses.

1. Avec cette étrave, on perdra au près car on a perdu de la longueur à la flottaison par rapport à Apivia. En revanche, le gros point à améliorer, c’était le travail du bateau au portant dans la mer : c’est le gain qu’on aura dans les mers du sud. J’espère qu’on aura même un bout de la réponse sur la Route du Rhum où il y aura beaucoup de portant avec des périodes où les foils ne seront pas très utiles.

2. Les foils : si on regarde les deux bateaux l’un à côté de l’autre, on verra que ce ne sont pas les mêmes formes mais il sera difficile de voir de grandes différences. On a cherché à avoir une autorégulation du bateau autour du foil, c’est-à-dire que plutôt que de régler le fil en permanence, on va chercher à avoir un foil polyvalent qui sera mieux sous plusieurs angles. Le but est d’avoir une capacité à trouver vite les bons réglages plutôt que de tâtonner. Donc, on sera plus polyvalent et moins typé.

3. La position des masses : on a cherché à reculer les choses, à les descendre. Le moteur n’est pas placé au même endroit. Le but est d’avoir du poids mieux placé au portant, notamment, toujours dans cette idée de relever le nez le plus possible. Il faut savoir qu’on portant, si on est très bas au portant, les foils ne sont presque pas utiles, ils poussent peu. Le bateau devient alors un bateau archimédien classique, comme un Imoca à dérives : là, on utilise uniquement la forme de la carène.

Pourquoi le choix de Guillaume Verdier comme architecte ?

À la base du projet, on voulait racheter un bateau existant, type Apivia ou L’Occitane en Provence mais cela ne s’est pas fait. Nous n’avons pas trouvé un bateau qui correspondait à notre programme, à savoir démarrer tôt et être au départ de la Route du Rhum, ce qui était très important pour nos partenaires.

Le coût n’est pas le même entre un bateau d’occasion et un Imoca neuf…

Les très bons bateaux d’occasion tournent entre 4,2 et 5 millions d’euros. Là, pour notre bateau neuf, ça tourne autour des 5,5 millions d’euros car c’est un sister-ship : on prend les mêmes plans, on utilise les mêmes moules ou plutôt ou loue les moules à Apivia et on rachète les plans à Verdier. Tout ce combiné, avec la partie études, c’est 1/5e du budget du bateau. Notre budget annuel de fonctionnement est d’un peu moins de 2 millions d’euros jusqu’au Vendée Globe.

Certains endroits du bateau, notamment les foils et leurs cages, ne peuvent pas être photographiés : pour quelle(s) raison(s) ?

C’est plus une raison architecturale. Les architectes ont trouvé des choses innovantes qu’ils souhaitent garder de manière confidentielle.

… sauf que vous êtes chez MerConcept, là où Charlie Dalin va, lui aussi, construire son Apivia n°2 : difficile de garder ses secrets non ?

Charlie aura le même bateau, enfin sensiblement le même. Ce sera la même chose sauf que nos foils ne sont pas placés au même endroit, donc la structure sera un peu différente. Mais l’idée de base est la même, c’est le même architecte.

Vous voulez être au départ de la Route du Rhum le 6 novembre et le bateau sera mis à l’eau en juin… Pas un peu serré le timing ?

Oui, le délai est très court. La raison pour laquelle on a fait construire la coque et le pont chez Multiplast à Vannes. La mise à l’eau est prévue mi-juin. On fera des navigations d’entraînement, l’enjeu de la Route du Rhum sera de finir la course et d’être qualifié pour le Vendée Globe 2024.

Pour le Vendée Globe 2024, il y a 39 places + 1 invitation. Malgré les 13 places « réservées » aux bateaux neufs, y a-t-il une course aux milles ?

Oui, un peu quand même : les 13 premiers bateaux neufs à avoir terminé une course en solitaire sont qualifiés pour le Vendée Globe. Sur la Route du Rhum, il va y avoir entre 8 et 9 bateaux neufs : s’ils finissent la transat, ils sont qualifiés pour le Vendée Globe. Ceux qui n’ont pas fini ou qui n’ont pas participé à la Route du Rhum vont mettre en jeu leur qualification sur la prochaine course en solitaire, à savoir la course retour de la Transat Jacques Vabre 2023. Donc fin 2023, tu peux encore te qualifier et, si tu ne termines pas cette course-là, tu rentres dans le moule des autres bateaux, tu ne fais plus partie des 13 bateaux neufs. Là, c’est au nombre de milles parcourus et là, tu n’es pas bien… Donc, il faut finir la Route du Rhum : 1. Pour se qualifier. 2. Pour revenir en solitaire par la mer et démarrer le cycle de performances. Car avant cela, on n’aura rien fait en perfs, à part enregistrer des données avec nos capteurs qu’on n’aura pas le temps d’analyser.

Un Imoca en chantier, ça veut dire un skipper à terre : or, on sait que la vérité est en mer…

Là, je vais passer 18 jours aux Antilles pour disputer la Carribean 600 et la Heineken Regatta en Ocean Fifty avec Gilles Lamiré. Je vais continuer à naviguer sur ‘ autres supports, notamment des entraînements en Class40 avec Antoine Carpentier mais malheureusement je ne vais pas faire d’Imoca.

Après un premier Vendée Globe très abouti (10e) avez-vous conscience qu’avec cet Imoca neuf, vous basculez en Ligue des Champions ?

Oui, si on compare à la Formule 1, oui on est McLaren. Au foot, on sait qu’on va jouer contre le PSG. Je sais qu’on nous attend au tournant et c’est le challenge qu’on a envie de se donner. On va y aller par étapes, progresser, se faire la main avec le bateau pour, ensuite, être clairement au contact des leaders actuels. On sait qu’on n’aura pas le dernier bateau né au départ du Vendée Globe mais on veut énormément naviguer avant, connaître le bateau. Et si on n’est pas dans le Top 3 ou 5 pendant toute la course, l’idée est d’être dans le coup. On a vu lors de la dernière édition que ce n’était pas forcément le bateau le plus rapide qui était devant à la fin. Ce sont quand même les bateaux les mieux construits et les marins ayant le plus navigué qui sont devant.

Avec tous ces bateaux neufs, quels sont les gros clients en Imoca pour les deux prochaines années ?

Il y a forcément Charlie Dalin qui bosse avec MerConcept depuis le début : ils ont un savoir-faire qui est impressionnant. C’est le PSG ! Nous sommes chez MerConcept car on voulait avoir un bateau fiable tout de suite. Après, en binôme « skipper-bateau », on aura aussi Yoann Richomme qui débarque avec son nouveau projet, ce sera forcément un client. Il y a aussi Jérémie Beyou et Thomas Ruyant, deux autres gros clients. Après, je ne peux pas tout dire car il y a des projets pas encore dévoilés (NDLR : sans le nommer, il fait allusion à Paul Meilhat qui construit un Imoca neuf, sur plans Verdier, chez Persico en Italie).

Il y a aussi à Sam Davies, Boris Herrmann, Kevin Escoffier, Yannick Bestaven, non ?

Oui bien sûr mais il y a tellement de monde ! Quand on a lancé notre projet, on se disait qu’on pouvait aller chatouiller un Top 5 mais on n’avait jamais imaginé qu’il y aurait 14 bateaux neufs.

Avant le départ du dernier Vendée Globe, on avait l’impression que vous aviez déjà le suivant en tête : quand avez-vous signé pour l’édition 2024 ?

On a signé pendant le tour du monde. À chaque fin de projet, j’ai pour habitude d’embarquer mes feuilles Excel et de les finir pendant la course. J’ai fait cela sur la Route du Rhum en 2014, sur la Transat Jacques Vabre en 2017 : je balance le fichier à mes partenaires en leur expliquant qu’il y a une suite possible. Là, je l’ai fait pendant la descente de l’Atlantique, entre l’équateur et l’Afrique du Sud. Dès le départ du Vendée Globe, les voyants étaient déjà au vert.

Ce nouvel Imoca aura une nouvelle décoration : pourquoi ce dragon ?

Ça vient de nous, de l’équipe de communication qui s’est dit que ça serait génial d’avoir un animal emblématique, un peu comme le font les équipes de basket, un truc qui rassemble les gens. On n’a pas pensé tout de suite au dragon et c’est venu par le fait que je suis parrain de l’association « Vaincre la mucoviscidose » : on voulait créer un lien avec cela, avec le souffle. Le souffle nous a emmenés au dragon. Nous avons commencé par un premier dragon, un peu timide sur la grand-voile et là, en plus des voiles, la coque sera le dragon.

Planning de V and B – Monbana – Mayenne

Construction : mai 2021 à juin 2022

Défi Azimut : septembre 2022

Route du Rhum – Destination Guadeloupe : novembre 2022

Rolex Fastnet : juillet 2023

Défi Azimut : septembre 2023

Transat Jacques Vabre – Normandie – Le Havre : novembre 2023

The Transat CIC : mai 2024

New York – Vendée : juin 2024

Défi Azimut : septembre 2024

Vendée Globe 2024 – 2025

Source @Le Télégramme